Ce matin, un petit paquet tout blanc l’attendait sur la table du petit déjeuner. Après avoir chipé quelques pâtes de coing, il a déballé ce cadeau sans fioriture : pas de papier à déchiré, pas de ruban à dénoué, juste une sorte d’enveloppe allongée à ouvrir. Il en a sorti un étui dont le couvercle transparent laissait apparaître le contenu : une petite montre avec de gros chiffres, les petits en bleu, d’autres plus gros en rouge, une grande aiguille bleue, une petite aiguille rouge. Le bracelet en tissu est parsemé de petits avions jaunes, bleus et rouges.

La surprise a fait son effet, et un large sourire est resté sur son visage une bonne partie de la matinée, tout fier de faire désormais partie de ceux qui arborent une montre à leur poignet ! Tout de suite, il a fallu que son Papa lui explique comment lire l’heure. Ce grand garçon trop excité par le moment n’était pas toujours aussi attentif que son aîné l’aurait souhaité, et il a dû répéter plusieurs fois quelques détails de la méthode. Cependant, l’air de rien, Mathias enregistrait bien, et il s’est ensuite bien amusé à égrener chaque minute du petit déjeuner dominical, scrutant le cadran à chaque bouchée de sa tartine, et affolant son Papa sur la vitesse du temps : "Comment ça, on a mis une heure pour prendre le p’tit déj ?!?"

Ensuite, régulièrement, Mathias s’est amusé à ôter et remettre son bracelet magique, et à déchiffrer l’heure. Combien de fois nous a-t-il demandé quelle heure il était ? Aujourd’hui, des centaines de fois, pour s’empresser de nous le dire, avec parfois quelques formules rigolotes. "Il est 10 h moins quarante-cinq" ! A vous de traduire...

Parfois, Mathias était déçu, les aiguilles ne tournant pas assez vite. Il regarde sa montre, et il est encore la même heure ! Pfff... Qu’est-ce que ça veut dire ? Mais qu’est-ce qu’il fait, ce temps, à prendre son temps entre chaque minute ? C’est que la patience n’est pas la plus grande qualité de Mathias.

Cette matinée restera dans la case des bons souvenirs, chacun étant surpris et heureux de voir que Mathias en soit déjà à jouer avec les heures et les minutes. Déjà, alors qu’il nous semble être né il y a si peu de temps... Une sacrée étape vient d’être passée, mine de rien, pour lui comme pour nous. Notre bonhomme vient d’entrer dans l’ère du temps qui passe, et qu’il va pouvoir mesurer par lui-même. Ce n’est pas anodin ! Mais il a encore le temps d’être un enfant, et de faire fi de ce que ce petit cadran lui annoncera. Quelle chance ! C’est le privilège de l’enfance, sans doute : apprendre, apprivoiser les choses, mais avoir le droit d’oublier tout ça le temps de jouer, de vivre. Finalement, le plus grand plaisir fut peut-être pour les parents ? Non, Mathias adore ce cadeau, passeport pour le monde des grands, à qui il peut montrer à volonté comme il apprend vite et bien, même s’il n’a que 6 ans.

Emma voyant tout l’attention de ses parents vers Mathias et son cadeau, rappela tout de même qu’elle aussi avait une montre, celle toute rose qu’elle avait eu au Noël de l’école l’année dernière... Mais bien sûr qu’on s’en souvient ! Et pour nous assurer qu’elle aussi sait plein de choses, elle s’applique à dessiner ses parents : une maman en rose, un papa en bleu, et précise à chaque crayonnage supplémentaire, ce qu’elle rajoute : un cou, des jambes... Alors elle aussi, bientôt, elle nous épatera avec des chiffres.