Le défi du sudoku

Depuis le début de la crise du "non" de Mathias - certains appellent ce moment la crise des "2 ans", mais à mon humble avis, à moins que mon fils soit une exception, le phénomène perdure bien au-delà des 2 ans - nous avons adopté une tactique classique : le "je compte jusqu’à 3". En général, avant d’arriver à 3, l’enfant a fini par obéir, tout en sauvant la face (il a tout de même tenu tête au parent !). Bref, la tactique est relativement bonne, mais elle a tout de même un gros défaut : nous ne comptons plus que jusqu’à 3... Parfois, c’est à se demander si on est encore capable de compter au-delà du chiffre fatidique ! J’en ai parlé avec d’autres mamans, et c’est vrai, je ne suis pas la seule à douter parfois de savoir encore compter plus loin.

Et bien hier j’ai eu une autre surprise : non seulement le parent peut avoir ce doute, mais l’enfant également ! La révélation s’est faite chez Philémon, avec qui la maman a utilisé la technique du "je compte jusqu’à 3", et là, surprise : le chenapan lui répond : "compte jusqu’à 16 !". Là, nous nous sommes regardées, perplexes, non pas du chiffre 16 (pourquoi au fait ?), mais plutôt par le fait que nous en sommes arrivées à nous faire défier par les enfants de compter au-delà de 3 !!! Il y a vraiment de quoi désespérer quand on songe à l’image que nous sommes amenées à donner à nos progénitures lors de cette crise du "non"...

Bon, nous nous sommes rassurées en échangeant nos états d’âmes sur le sujet. Mais finalement, ça démange de vérifier que nous avons bien encore quelques neurones nous permettant de raisonner, réfléchir, déduire, avoir un minimum de jugeotte et de logique malgré grossesses, allaitement et crises diverses. Or ça tombe bien : hier je reçois dans ma boîte aux lettres, le petit bulletin de liaison de la chaîne de magasins "U" (magnifique avantage de notre abonnement à la carte du même nom), qui offre grâcieusement un petit livret de jeux et de recettes. Dans ce fantastique cadeau, je trouve 3 grilles de sudoku. Ah, voilà l’occasion de tester mes capacités de réflexion, histoire de me rassurer sur le bon fonctionnement de mon cerveau.

Le lendemain matin, levée à 7h, seule, je profite de ce moment de calme pour me lancer dans le test. A peine commencé, Sabou miaule, il braille tant et tant que je finis par lui donner de la pâtée pour retrouver le silence - enfin, presque, parce que Sabou ayant du Siamois dans son patrimoine génétique, il miaule énormément, longtemps et fort. C’est le vétérinaire qui l’affirme... Enfin, cette tâche achevée, je me remets au sudoku, quand un petit poulain rampe jusqu’à mes pieds. C’est Mathias - en ce moment, il s’amuse à être un petit poulain - qui me réclame son biberon du matin. Bon, pas de problème, je prépare le chocolat, puis me remets au sudoku. Mais Mathias me raconte des histoires, me demande mon avis sur ceci, sur cela. Vous savez quoi ?

"- Le Bernard d’à côté de la maison de Beaune (en clair, le voisin de Pépé et Mémé) est vieux maintenant. (Math)

- Ah bon ? (moi)

- Ben oui, c’est le pépé et la Mémé qui l’ont dit ! (Math)

- Ah ben, alors ça doit être vrai..." (moi)

J’essaie de me concentrer sur les chiffres, péniblement, mais bon, il faut essayer ! Puis Emma chouine, elle se réveille. Je vais la chercher, lui change la couche, la place dans le trotteur, espérant terminer ce fichu sudoku. Mais Emma me tire les vêtements pour m’interpeler, elle babille, et son frère me raconte encore des histoires, et maintenant Jérôme se réveille, et Sabou monte sur mes genoux et fait ses griffes sur mes cuisses.

Bon, j’abandonne : j’ai péniblement réussi à inscrire 3 ou 4 chiffres en 1/4 d’heure - dont 1/100 vraiment pour le jeu - je suis énervée, et pars pour une journée bien remplie déjà, sans sudoku. Tant pis pour les neurones, ils attendront la retraite pour refaire un peu d’exercice de ce genre. En attendant, ils vont se consacrer aux couches, aux lessives, aux jeux et lectures des enfants, aux courses, etc... Et le docteur Machin qui fait de la pub pour nous inciter à connaître l’âge de notre cerveau n’a qu’à inventer un test plus pratique pour les mères de famille.



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